La prophétesse Déborah |
.
La "religion d'Israël" pré-exilique (c'est-à-dire celle d'avant le VIème siècle avant J.-C) a d'une part précédé le "judaïsme", mais d'autre part est elle-même issue de la "religion hébreue-cananéenne", dont elle s'est peu à peu démarquée.
La "redécouvrir" est moins ardu qu'il n'y paraît de prime abord. Et cela en dépit des efforts réels - mais insuffisants - entrepris par les différents compilateurs monothéistes judaïques pour "harmoniser" le contenu des 24 Livres du "Canon" biblique.
Pour cela, il suffit de se plonger dans la dite Bible et ses 24 livres hétéroclites, afin d'y tracer un tableau distinguant 2 listes : 1. La liste des livres appartenant au substrat de l'hénothéisme israélite (voire du polythéisme, de l'animisme, et du totémisme hébreu-cananéen). 2. La liste des livres qu'on peut ranger dans le giron exclusif du monothéisme judaïque post-exilique.
Quelques remarques préalables s'imposent : 1. La "Bible" que l'on connaît n'est pas disposée dans un ordre chronologique de rédaction. Néanmoins, et pour faciliter l'exposé, nous utiliserons l'ordre admis et désormais "normatif". 2. Certains livres mêlent (volontairement ou involontairement) hénothéisme pré-exilique et monothéisme post-exilique. 3. D'autres, comme le Pentateuque, font usage de substrats anciens à la fois hébreux animistes, totémistes, et polythéistes que d'hénothéisme israélite, bien que la rédaction-compilation finale soit monothéiste post-exilique. 5. Et enfin, quelques livres (les plus rares) sont quasiment inclassables car ils sont entachés de syncrétisme et de réminiscences volontaires de l'hébraïsme animiste, totémiste, ou polythéiste.
1. Le Pentateuque (ou "Les Cinq livres de la "Torah de Moïse") : Monothéisme judaïque post-exilique + Hénothéisme israélite + Traces involontaires de réminiscences hébraïques animistes, totémistes et polythéistes.
2. Le livre de Josué : Monothéisme judaïque post-exilique.
3. Le livre des Juges : Hénothéisme israélite pré-exilique.
4. Samuel I et II : Hénothéisme israélite pré-exilique.
5. Rois I et II : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
6. Livre des 3 Grands Prophètes :
YIsha'yahou (Isaïe) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Yrmyahou (Jérémie) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Yehezqel (Ezéqiel) : Monothéisme judaïque post-exilique.
7. Livre des 12 Petits Prophètes :
Hose'a (Osée) : Hénothéisme israélite pré-exilique.
Yoel (Joël) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
'Amos (Amos) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Obadyah (Obadia) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Yonah (Jonas) : Hénothéisme israélite pré-exilique
Mykha (Michée) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Nahoum (Nahum) : Hénothéisme israélite pré-exilique
Habaquq (Habacuc) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Cefaniah (Shophonie) : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
Hagay (Haggée) : Monothéisme judaïque post-exilique.
Zekharyah (Zakarie) : Monothéisme judaïque post-exilique.
Malakhy (Malachie) : Monothéisme judaïque post-exilique.
8. Les Psaumes : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
9. Job : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
10. Les Proverbes : Hénothéisme israélite pré-exilique + Monothéisme judaïque post-exilique.
11. Le rouleau de Ruth : Hénothéisme israélite pré-exilique
12. Le Cantique des Cantiques : Traces volontaires de réminiscences d'hébraïsme animiste, d'hénothéisme israélite, quoique rédigé à une époque pos-exilique.
13. Qohelet (l'Ecclésiaste) : Traces volontaires de réminiscences d'hébraïsme animiste et d'hénothéisme israélite, quoique rédigé à une époque post-exilique.
14. Les Lamentations : Monothéisme judaïque post-exilique.
15. Le Rouleau d'Esther : Monothéisme judaïque post-exilique.
16. Daniel : Monothéisme judaïque post-exilique.
17. 'Ezrah (Esdras) : Monothéisme judaïque post-exilique.
18. Nehemyah (Néhémie) : Monothéisme judaïque post-exilique.
19. Chroniques I et II : Monothéisme judaïque post-exilique.
Si l'on s'en tient aux textes exclusivement hénothéistes pré-exiliques (et à la rigueur aux réminiscences hébreues pré-hénothéistes), à quoi se résume donc "la religion d'Israël" ?
La première chose qui saute aux yeux, est l'absence de tout rituel et de toute "religion". La seconde est le peu de cas fait à la législation méticuleuse de la "Torah de Moïse" et à sa juridiction oppressive qui, elles, envahissent le monothéisme judaïque ! Point de lois sur le shabbat, et point de shabbat ! Point de punitions ou de condamnations à mort pour avoir transgressé les "directives sacerdotales" sur les sacrifices ou sur les "fêtes sacro-saintes". Point non plus de "cacherout" ou de "règles de souillure de l'homme" ou de "purification de la femme", etc… etc…
Rien de tout cela ! Les hommes sont libres, autonomes, indépendants, rebelles et agissent au nom de Yahweh et du "souffle qui est en eux". La femme par exemple, est également vue comme une personne libre et "souveraine". Elle peut même accéder au statut de "juge" et "prophète" d'Israël (voir Déborah la prophétesse), en dépit de la filiation patrilinéaire.
Bref, l'hénothéisme israélite se distingue sensiblement du monothéisme judaïque et a fortiori de son rejeton pharisien-rabbinique dont il se trouve aux antipodes !
La quintessence de l'hénothéisme israélite pré-exilique, est la notion fondamentale que Yahweh – en tant que Souffle divin intérieur qui doit animer tout Israélite dans ses actes, gestes, pensées, et paroles -, est le Dieu ethnique ("national" pour faire usage d'un terme moderne) exclusif aux Israélites. Les "Dieux" des autres peuples existent certes, mais leur existence ne doit avoir aucune portée et influence sur le lien particulier et jaloux entre le peuple d'Israël et "son" Yahweh. Car d'après l'hénothéisme israélite, ce n'est pas tant Yahweh qui a "élu" un peuple, mais plutôt un peuple qui a jeté son dévolu sur Yahweh ! Israël n'est donc pas le "peuple élu" mais le peuple qui a "choisi" !
Et en tant que choisi, Yahweh se doit de devenir non seulement le garant de l'intégrité de la confédération politique des tribus, appelée justement "Israël" ("Yshra-El", mot composé qui d'un point de vue étymologique signifie "le sillon droit fait par le Taureau de Dieu."), mais aussi de ses valeurs essentielles telles que : grands principes de comportement moral entre tous les Israélites, dignité et respect à l'égard de tous les humains dotés d'éthique, liberté et justice dans tous les domaines, esprit de droiture redoutable et d'insoumission innée à la violence, à l'injustice et à l'arbitraire, amour de la terre d'Israël et défense de la patrie ancestrale face à un danger extérieur, même au péril de sa vie.
David A. Belhassen
0 коммент.:
Enregistrer un commentaire