Tout
expert du Coran le sait : le mot "Amour" – dans son sens abstrait et sublimé - n'existe pas dans le Coran.
A la place de cet amour sublimé pour Dieu ou l'être aimé, on trouve dans
le Coran, une autre sorte "d'amour", rendue par le terme "hub".
En effet, la plupart des versions françaises
du Coran, traduisent "hub" par "amour". Mais selon son étymologie
(commune également à l'hébreu et à l'araméen), la racine de "hub" est
HB ou HBB (avec un H guttural), et elle signifie "désir",
"volonté d'avoir", "dû", "obligation", mais aussi
"convoitise", "passion", "ardeur",
"attirance", "aspiration", et à la rigueur "affection"
dans le sens de "chérir".
Dans la Bible, la racine HB ne signifie jamais "amour" de Dieu ou
de son prochain. Pour cela, l'hébreu biblique fait usage du terme ahawah
(de racine AHB, avec un H aspiré), et jamais de "hibah".
Tandis que dans le Coran, "hub" est employé à la fois pour le désir
charnel ou vénal que pour "l'amour sublimé".
Voici un exemple d'un tel amour-désir, au verset 14 de la sourate 3
:
زُيِّنَ لِلنَّاسِ حُبُّ الشَّهَوَاتِ مِنَ النِّسَاءِ وَالْبَنِينَ وَالْقَنَاطِيرِ الْمُقَنْطَرَةِ مِنَ الذَّهَبِ وَالْفِضَّةِ وَالْخَيْلِ الْمُسَوَّمَةِ وَالْأَنْعَامِ وَالْحَرْثِ ذَلِكَ مَتَاعُ الْحَيَاةِ الدُّنْيَا وَاللَّهُ عِنْدَهُ حُسْنُ الْمَآبِ
Transcription
phonétique :
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zuyin lil nass hub
al shahawat min al nissâ wa al baniyn wa al qanatiyr al muqantarat
min al dhahab wa al fidat wa al khayl al mussawamat wa al an’am wa al harth dhalik mata’u al hayat al
dunya wa allah ‘indahu husnu al maab
Traduction :
on a embelli aux
gens l'amour des voluptés de femmes et de fils et de trésors
thésaurisés d'or et d'argent et de montures racées et de bétails et de
labours telle est la jouissance de la vie ici-bas mais auprès d'allah est le
meilleur séjour
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Cet "amour" des voluptés de femmes (donc de descendance, donc de "fils"),
mais aussi le désir de trésors d'argent et d'or, de chevaux (ainsi que de
troupeaux et de terres), ressemble à s'y méprendre à
"l'avertissement" mentionné dans le Pentateuque (Deutéronome 17, 15-17)
concernant le monarque :
Tu
mettras sur toi un roi que choisira Yahweh, ton Dieu… Seulement
qu'il ne multiplie pas le nombre de ses chevaux… Et qu'il ne
multiplie pas le nombre de ses femmes, et que ne dévie pas son cœur; et d'argent
et d'or, qu'il n'en multiplie pas trop.
Le Coran utilise d'ailleurs plusieurs fois le mot
"hub" pour dénoncer "l'amour des richesses". Comme par
exemple dans le verset 20 de la
sourate 89 :
وَتُحِبُّونَ الْمَالَ حُبًّا جَمًّا
et vous aimez les richesses d'un
amour sans bornes
Il est ici évident que le terme "amour" ne signifie
nullement "l'amour de Dieu" sublimé, mais le "désir"
vénal, la "convoitise" etc…, et qu'il serait plus pertinent de
traduire par :
et vous convoitez les richesses
d'une convoitise sans bornes
Faire usage de la racine "hub" pour parler "d'amour de
Dieu" ou "d'amour de l'humanité", serait donc indécent, voire
scabreux. En somme, une véritable hérésie !
Et pourtant le Coran le fait dans le verset 165 de la sourate 2 :
وَمِنَ النَّاسِ مَنْ يَتَّخِذُ مِنْ دُونِ اللَّهِ أَنْدَادًا يُحِبُّونَهُمْ كَحُبِّ اللَّهِ وَالَّذِينَ آمَنُوا أَشَدُّ حُبًّا لِلَّهِ وَلَوْ يَرَى الَّذِينَ ظَلَمُوا إِذْ يَرَوْنَ الْعَذَابَ أَنَّ الْقُوَّةَ لِلَّهِ جَمِيعًا وَأَنَّ اللَّهَ شَدِيدُ الْعَذَابِ
Transcription phonétique :
wa min al nass man yatakhidhu min duwn allah andadan yuhibuwnahum
ka hub allah wa aladhiyn amanuw ashad hub li lah wa law yarâ al ladhiyn thalamuw idh yarawna al ’adhab ana al quwat li
lah jamiy’an wa ana allah shadiyd al ’adhab
Ce verset est
communément traduit en français par :
et parmi les hommes il en est qui prennent au
lieu de allah des égaux à lui ils les aiment comme on aime allah et ceux qui
croient sont plus durs à l'amour pour dieu et s'ils avaient vu ceux qui ont idolâtré
alors ils verront le châtiment car la force est à dieu réunie car allah est dur
en châtiment
Alors que, pour être
fidèle à l'étymologie du mot "hub", il aurait été préférable
de traduire :
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et parmi les hommes il en est qui prennent au lieu de allah
des égaux à lui en les chérissant comme on chérit
allah et ceux qui croient sont les plus durs à chérir allah et
s'ils avaient vu ceux qui ont idolâtré alors ils verront le châtiment car la
force est à allah entièrement car allah est dur en châtiment
Conclusion :
Par l'usage de la même racine HoB pour "désirer" et
"aimer", le Coran fait l'amalgame entre deux concepts distincts : "désir
vénal" et "amour sublimé".
Est-ce là le "visage de l'Amour", dans le Coran ? Cela ne dénote-
t-il pas d'un faible degré d'élévation spirituelle de l'islam dans sa ferveur
pour Allah ?
Bonjour David,
RépondreSupprimerVous nous dîtes en fin de compte : "Cela ne dénote- t-il pas d'un faible degré d'élévation spirituelle de l'islam dans sa ferveur pour Allah ?" J'aurais plutôt envie de vous dire à vous lire, qu'on a l'impression que le Coran a été rédigé par un scribe ou des personnes de niveau moyen quant à toutes les notions que vous abordez. Qui finalement ne faisaient pas vraiment la différence entre cette "désir vénal" et "amour sublimé" comme vous dites. N'est-ce pas finalement un peu trop complexe en l'espèce ?
J'aurais une question à vous poser : existe-t-il en arabe une autre racine que hub pour désigner "l'amour". Si hub correspond au désir, quel mot correspond-il alors à l'amour sublimé ? Y a-t-il en arabe un mot qui reprend la racine Ahava comme en hébreu ?
Merci.
Méïr
Bonjour Meïr. Pour répondre à votre question, il n'y a pas en langue arabe du Coran, une autre racine équivalente à "ahavah" en hébreu, pour désigner l'amour sublimé. A part "hub" qui renvoit à "désirer", il existe dans le Coran un autre terme, rarement employé, emprunté à la racine hébraïque "dwd" et qui elle-aussi renvoit à "désir", à "amour charnel", à "attirance physique", à "séduction amoureuse" dans une connotation sexuelle. Il est à noter que le nom du Roi David (prononcé en hébreu archaïque "Dawid") vient de cette racine et signifie "amant", "désiré", "séducteur". Voir aussi par exemple dans le Cantique des Cantiques où la bergère dit à son amoureux : "ani le dowdi et dowdi li" (traduction : "je suis à mon amant et mon amant est à moi") dans le cadre d'un désir réciproque sensuel et charnel à tel point osé que l'exégèse rabbinique en a été choquée et s'est cru obligée de métamorphoser artificiellement le "Cantique des Cantiques" en parabole et en allégorie abstraite de "l'amour divin pour l'assemblée d'Israël". .
RépondreSupprimerIntéressant. Ce que vous dites sur dowdi me fait penser au Lekha dowdi du shabat ? לך דודי ... S'agit-il de la même chose ? Je n'y ai jamais réfléchi, mais je pense que oui si on regarde la suite des paroles.
RépondreSupprimerלך דודי לקראת כלה, פנה שבת נקבלה
Méïr
En effet Meïr, c'est la même racine et le même sens. Bravo pour votre perspicacité.
RépondreSupprimerhttp://www.lemessieetsonprophete.com/annexes/L'idee%20'd'aimer'%20selon%20le%20Coran.htm
RépondreSupprimerBon article, Nejma. Avec une seule erreur, mais déterminante. La racine HBB ne signifie pas "aimer", mais comme je l'ai expliqué dans mon article.
RépondreSupprimerOui David j'ai lu votre article
RépondreSupprimerEt celui ci vient préciser le vôtre.
Thanks, great post
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