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Unicité, Unité, et Trinité

Trop de railleries sont adressées, de la part des adeptes du judaïsme et ceux de l'islam, à l'encontre de la croyance chrétienne sur la Trinité.
Ces railleries sont pour ainsi dire "compréhensibles" provenant des musulmans et de leur théologie monothéiste coranique, mais elles le sont beaucoup moins lorsqu'elles viennent des juifs et de la théologie monothéiste judaïque.
Voici pourquoi :
La profession de foi musulmane par excellence est la shahâdah (en arabe : شهادة « attestation » ou « témoignage »), attestant de l'unicité de Allah :
أشهد أن لآ إلَـهَ اِلا الله وأشهد أن محمدا رسول الله
Transcription phonétique :
ashadu an lâ ilâha ila allâh wa ashadu an muḥammad rassoûl allâh
Traduction littérale :
je témoigne que pas de dieu sinon allâh et je témoigne que muhammad est l'envoyé de allâh
Or cette "shahâdah", telle qu'elle est récitée et prononcée dans les mosquées, ne se trouve nulle part dans le Coran !
On trouve dans le Coran des versets de différentes "sourates" (chapitres) du Coran qui donnent les variantes ou versions suivantes :
Sourate 3 verset 18 :
شَهِدَ اللَّهُ أَنَّهُ لَا إِلَهَ إِلَّا هُوَ وَالْمَلَائِكَةُ وَأُولُو الْعِلْمِ قَائِمًا بِالْقِسْطِ لَا إِلَهَ إِلَّا هُوَ الْعَزِيزُ الْحَكِيمُ
Traduction littérale :
témoigne allah qu'il n'y a pas de dieu sinon lui et les anges et les maîtres du savoir qu'il s'érige en vérité pas de dieu sinon lui le puissant le sage
Traduction francisée et ponctuée :
« Allah témoigne, ainsi que les anges et les maîtres du savoir, qu'il n'y a pas de Dieu sinon lui. Il existe réellement. Pas de Dieu sinon lui le puissant le sage »
Sourate 7 verset 158 :
قُلْ يَا أَيُّهَا النَّاسُ إِنِّي رَسُولُ اللَّهِ إِلَيْكُمْ جَمِيعًا الَّذِي لَهُ مُلْكُ السَّمَاوَاتِ وَالْأَرْضِ لَا إِلَهَ إِلَّا هُوَ يُحْيِي وَيُمِيتُ فَآمِنُوا بِاللَّهِ وَرَسُولِهِ النَّبِيِّ الْأُمِّيِّ الَّذِي يُؤْمِنُ بِاللَّهِ وَكَلِمَاتِهِ وَاتَّبِعُوهُ لَعَلَّكُمْ تَهْتَدُونَ
Traduction littérale :
dis ô et ohé les gens je suis l'envoyé d'allah vers vous tous à lui la royauté des cieux et du pays pas de dieu sinon lui il fait vivre et mourir alors croyez en allah et en son envoyé le prophète des matries qui croit en allah et en ses paroles et suivez-le afin que vous soyez guidés
Traduction francisée et ponctuée :
« Dis : « Ô et ohé gens ! Je suis pour vous tous l'envoyé d'Allah, à qui appartient la royauté des cieux et de la terre. Pas de Dieu sinon lui. Il fait vivre et fait mourir. Croyez donc en Allah et en son envoyé, le prophète des nations qui croit en Allah et en ses paroles. Et suivez-le afin que vous soyez guidés. »
Sourate 37, verset 35 :
إِنَّهُمْ كَانُوا إِذَا قِيلَ لَهُمْ لَا إِلَهَ إِلَّا اللَّهُ يَسْتَكْبِرُونَ
Traduction littérale :
voici qu'eux quand il leur fut dit pas de dieu sinon allah ils se grandissent
Traduction francisée et ponctuée :
Eux, quand on leur disait : « Pas de Dieu sinon Allah", ils s'enorgueillirent. »
Dans ce dernier verset (37, 35), il y est fait usage de "Ilaha" qui est la transcription coranique de l'hébreu "Eloha", et de l'araméen "Elah" pour rendre le nom commun "Dieu"! D'un point de vue étymologique et grammatical, "Allah" ne vient ni de Eloha, ni de de Elah, et ni de Ilaha. Il est le défini de Lâh. C'est donc qu'il est un nom spécifique du Dieu du Coran autre que le nom commun pour dire Dieu en hébreu, en araméen, et en arabe !
Il semble donc que la Shahadah "Lâ ilâha illa Allâh" affirme non seulement l'inexistence d'un autre Dieu (Ilaha) que Allah, mais aussi l'illégitimité du culte qui lui serait voué.
Le Coran se réfère ici à la Bible (le livre des Psaumes 18, 32) où le terme commun pour désigner Dieu "Eloha" est suivi du nom propre du Dieu des Israélites : Yahweh, c'est-à-dire le Tétragramme sacré YHWH.  
Ki mi eloha mi bal'adey Yahweh
Qui donc est Dieu hormis Yahweh
Pourquoi alors le Coran ignore- t-il le Tétragramme - YHWH -, et le remplace par Allah ? Cela peut se comprendre par le fait que le rédacteur du Coran n'a jamais pu entendre le Tétragramme de la bouche de son rabbin-mentor. En effet, la prononciation du Tétragramme sacré était strictement interdite depuis la destruction du Temple de Jérusalem en 70 après J.-C.  
Il existe un autre verset évoquant une variante supplémentaire de la Shahâdah. Celui de la sourate 2, 163. Le voici en arabe et en hébreu, puis en phonétique des deux langues, et ensuite la traduction en français :
وَإِلَهُكُمْ إِلَهٌ وَاحِدٌ لَا إِلَهَ إِلَّا هُوَ الرَّحْمَنُ الرَّحِيمُ
ואלוהכם אלוה יחיד אין אלוה אלא הוא הרחמן הרחום
En arabe : wa ilahukum ilah wahid la ilaha ila huw al rahman al rahiym
En hébreu : we elohakem eloha yahid lo eloha ela huw ha rahman ha rahum
En français : et votre dieu est un dieu unique pas de dieu sinon lui le clément le compatissant
Comparons ici les transcriptions phonétiques arabe et hébreu : La ressemblance frappante est visible d’un coup d’oeil. On a l'impression de lire deux phrases calquées l'une sur l'autre. Tous les mots sont identiques (à quelques infimes variations près, dues à la différence de vocalisation).
Ce verset 2, 163 du Coran évoque immanquablement le célèbre "Shema', c'est-à-dire la profession de foi judaïque(ou plutôt israélo-judaïque), telle qu'elle se trouve dans la "Torah de Moïse" (Deutéronome 6, 4) :  
Shema' Israël, Yahweh eloheynu Yahweh ehad
Entends Israël, Yahweh est notre Dieu, Yahweh est un
Mais si on s'y penche plus attentivement, on découvre deux différences de taille entre le verset de la Torah (Deutéronome 6, 4) et celui du Coran (2, 163).  Regardons-cela de plus près :
Dans la Torah : Yahweh ehad
Dans le Coran : Ilah wahid
Là où la Torah fait usage du nom propre de Dieu (Yahweh), le Coran utilise un nom commun (Ilaha). Là où la Torah dit ehad, donc "un", le Coran dit wahid, donc "unique".
Ce qui change tout ! Car si l'hébreu de la Torah de Moïse évoque l'unité de Yahweh, le Coran parle de l'unicité d'Ilah !
L'unité divine aspire à ce que l'humanité devienne Une, qu'elle s'assemble, s'unifie ou se réunifie. Elle englobe donc en son sein l'universalité unifiée de l'humanité, en dépit de sa pluralité. Et telle était l'intention première du monothéisme israélite-judaïque, avant qu'il ne se dévoie.  
L'unicité elle, comme son nom l'indique, évoque l'exclusivité, c'est-à-dire incite à " dissoudre " autrui dans son unicité, sous peine de l'exclure ou de l'anéantir ! Et c'est ainsi que le musulman comprend sa profession de foi lorsqu'il proclame sa shahâdah.  
Est-ce là le problème psychologique fondamental de tout musulman ? Est-ce la clé de son intolérance à l'égard des autres manières de croire au Dieu-Un du monothéisme et à fortiori des Dieux du non-monothéisme ? Est-ce là l'origine de l'errance criminelle islamique et l'égarement monstrueux du "jihadisme" ?
Mais alors, pourquoi le judaïsme qui parle d'un Dieu-un et non d'un Dieu unique a-t-il le même réflexe de rejet à l'égard de la Trinité (tri-unité) chrétienne d'une part, et d'autre part se sent des "atomes crochus" avec l'Unicité musulmane ? Alors qu'en fait, il devrait se sentir beaucoup plus proche de la Trinité chrétienne que de l'Unicité musulmane !
D'autant plus que cela n'a pas toujours été le cas ! A la page 43 du volume II du "Livre du Zohar" (prêté à Shim'on Bar Yohaï au deuxième siècle après J.-C, mais en vérité rédigé par Moïse de Léon, au XIIème siècle après J.-C), il est dit :
"Comment 3 noms peuvent être Un ? Sont-ils Un parce que nous les appelons Un ? Comment sont-ils Un ? Ce n'est que par le Saint Esprit que je saurais, même les yeux clos, que 3 font 1 !... Et lorsque je dis "Entends Israël, Yahweh notre Dieu est Un, ce sont trois nuances d'unités rassemblées dans Une unité… et ainsi, je comprends l'Unité parfaite de l'infini… par la petite voix qui fait que 3 font Un."
N'est-ce pas là exactement ce que disent les chrétiens tri-unitaristes lorsqu'ils parlent du "Mystère de la Trinité" ("Le Père, le Fils, et le Saint-Esprit") ?
Certes, il est vrai que Moshe de Léon a été influencé par les Cathares. Mais cela n'empêche pas qu'il parle au nom du judaïsme, et qu'il ne voit pas dans la profession de Foi de la Trinité chrétienne une hérésie. Bien au contraire ! Il dit en fait que cette profession de Foi de la Trinité préexistait dans le judaïsme !
Les monothéistes judaïques feraient donc bien de laisser aux monothéistes musulmans les railleries débiles et les moqueries condescendantes envers la Trinité chrétienne. Car celles-ci risquent de se retourner contre eux-mêmes !
David A. Belhassen

7 коммент.:

  1. Très intéressant.
    Moïse de Léon et le Zohar font d'une certaine façon du judaïsme le précurseur de la Trinité (même si on peut y voir une interprétation un peu prétentieuse). Le Zohar propose d'ailleurs des analyses qui réhabilitent une forme de pensée "polythéïsante" dirais-je, où le Dieu-Un devient multiple. C'est finalement ça qui en fait une œuvre passionnante. N'en déplaise à tous ceux qui haïssent toute forme de multiplicité divine.
    Mais finalement après ce bel article, je reste quand même sur ma faim... avec un tel titre je m'attendais à lire une analyse sur la Trinité elle-même. Pas grave, pour la prochaine fois.
    Cordialement,

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  2. Bonjour Meïr. Le titre était "Unicité, Unité, et Trinité". Mais vous avez raison de dire que le sujet de la Trinité mérite une analyse à elle seule, d'autant plus qu'elle a été souvent mal compris par tous ceux qui ne sont pas des hébraïsants, et ne peuvent ainsi percevoir la signification multiple des termes : "Père" (AB en hébreu), "Fils" ("Ben" en hébreu), et "Saint Esprit" ("Rouah ha qodesh" en hébreu, qu'il vaudrait mieux traduire non pas par "Saint Esprit", mais par "Inspiration de sublimation").

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  3. je vais vous raconter un vrai fait. un jour de chavouot je me suis rendu à la cathédrale notre dame à paris bien sur car il y avait ce jour là des prières pour mon voisin argentin décédé que je connaissais depuis 30 ans.
    l'évêque a expliquer la signification du saint esprit. Si j'ai bien compris le saint esprit a remplacé le matan thora dans le coeur des apôtres pour ce dégager de la religion initiale de yehosha. car ils disent que le jour de la crucifixion de yoshoua, le tonnerre ,les eclairs, la nuit noire comme le jour ou dieu a transmis la thora à moise.
    Nos amis chrétiens catalan de Barcelone ont eu aussi découvert cette expliquation de l'éveque de notre dame.
    a trés bientot en israel

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  4. Bonsoir Alain. Très intéressant. J'ai quelques remarques concernant le "Saint Esprit" qui en vérité est "le souffle de sanctification", ou le "souffle d'inspiration". Ce qui prouve qu'il faut toujours chercher et encore chercher, jusqu'à ce que la vérité jaillisse.

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  5. Bonjour David,
    Pour un croyant (que je ne suis pas), que veut dire au juste le "Dieu Un" ? Comment comprendre et reconnaître "Yahweh Ehad" sans rejeter de facto les autres dieux et le polythéisme comme avec le "Dieu unique"?

    Votre explication parlant de "l'unité divine aspire à ce que l'humanité devienne Une, qu'elle s'assemble, s'unifie ou se réunifie. Elle englobe donc en son sein l'universalité unifiée de l'humanité, en dépit de sa pluralité" et que vous considérez comme non-exclusif ne m'est pas clair et me me parait même un peu "tirée par les cheveux".
    Merci d'avance.

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  6. Bonjour André. Je comprends tout à fait que cette explication d'un "Dieu-un" qui permet l'unité en dépit du monothéisme exclusif, vous semble "tirée par les cheveux". Néanmoins, elle est possible dans la langue hébraïque. C'est une fenêtre sémantique très étroite qui, certes, contredit tout ce à quoi aspire le monothéisme judaïque et tout ce que prône le Pentateuque, mais il faut saisir cette occasion que nous offre la langue hébraïque et y pénétrer par l'interstice de cette fenêtre sémantique pour neutraliser la nocivité de la notion de "Dieu-un", en l'opposant à celle de "Dieu-unique". En effet, Un en hébreu ("ehad") est différent de "yahid" ("unique"). La notion de "ehad" permet de la comprendre comme "unité", tandis que "yahid" tend à l'exclusivité. Ne nous interdisons donc pas de torpiller le monothéisme en faisant usage de sa propre terminologie. C'est aussi un clin d'oeil à l'hénothéisme israélite pré-judaïque qui revendiquait son Dieu local Yahweh, tout en reconnaissant l'existence des Dieux locaux des autres peuples.

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    1. Entendu, c'est très intéressant. Et merci pour votre disponibilité.

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